Comment concilier excellence scientifique et diversité éditoriale dans le paysage de la recherche académique ? À l’heure où les modèles de publication traditionnels sont remis en question, Episciences s’érige comme une alternative innovante dans le paysage de l’édition scientifique.
Ce 9e opus de “Parlons Science ouverte” met en lumière les dernières actualités d’Episciences en faveur de la bibliodiversité, avec un focus particulier sur l’une des dernières revues de la plateforme, Open Plasma Science, la première publication de physique en modèle diamant soutenue par l’Université de Lorraine.
À ce titre sont intervenu·es :
- Céline Barthonnat, responsable éditoriale à Episciences, CCSD
- Raphaël Tournoy, responsable de la plateforme Episciences, CCSD
- Hélène Lowinger, coordinatrice du pôle Édition scientifique, Service Information et édition scientifiques (IES), Inria-DCIS
- Aricia Bassinet, chargée d’appui à l’édition scientifique, Université de Lorraine
- Aemil Querre, chargé d’édition scientifique, Université de Lorraine
Ce billet est une synthèse des présentations de la 9e édition de “Parlons Science ouverte”.
Point d’actualité Episciences
En constante évolution depuis 2013, Episciences enrichit chaque année son catalogue de revues. En mai 2024, celui-ci compte désormais 36 revues, soit dix de plus qu’en 2023. Initialement axée sur les revues de mathématiques, informatique et sciences humaines et sociales, Episciences s’ouvre aujourd’hui à de nouvelles disciplines telles que la biomécanique, la physique ou encore les sciences de la santé.
Dans le cadre de la refonte des sites institutionnels du CCSD en 2023, le site vitrine d’Episciences a été modernisé. La documentation d’Episciences s’est enrichie de tutoriels vidéo décrivant pas à pas comment déposer un preprint sur arXiv, HAL et Zenodo.
Pour soumettre une publication à une revue Episciences, le processus est simple. Il suffit d’utiliser l’identifiant attribué par l’archive où le document a été déposé au préalable, accompagné de son numéro de version. Sur HAL, cette démarche est depuis peu facilitée. En effet, le formulaire de dépôt dans HAL inclut désormais la possibilité de soumettre directement à une revue Episciences.
Il est également possible d’ajouter des informations supplémentaires à une soumission, tels les identifiants pérennes de logiciels archivés par Software Heritage (SWHID) ou des liens vers des jeux de données. Une fois l’article publié sur Episciences, un processus automatique d’enrichissement des métadonnées se met en place. Ainsi, des identifiants ORCID sont récupérés via l’API OpenAIRE Graph, les références citant des publications Episciences via OpenCitations et des liens entre jeux de données et publications via Scholexplorer. Une nouvelle application permet d’extraire facilement les références bibliographiques pour les exposer avec les articles et les diffuser via les métadonnées des DOI Crossref. Les métadonnées d’Episciences sont disponibles sous licence CC0 grâce à un entrepôt OAI-PMH et une API REST.
En résumé, Episciences offre de nouveaux outils pour faciliter le processus de soumission, de publication et d’enrichissement des métadonnées.
Référencement sur Episciences : retour d’expérience Inria
Présentation d’Hélène Lowinger
Dans un océan de revues et d’articles en constante croissance, le référencement se présente comme un défi majeur pour se démarquer. En effet, une meilleure indexation permet à une revue d’améliorer sa découvrabilité et sa visibilité, renforçant son attrait auprès des chercheurs et des financeurs. Cela se traduit par une augmentation du nombre de soumissions, contribuant à sa renommée et, naturellement, à son impact en termes de citations. Les revues diamant ne font pas exception et s’engagent également dans cette démarche de référencement.
Dans cette optique, Inria, en charge du portefeuille de revues en informatique et maths appliquées d’Episciences, a choisi de privilégier des bases de données de référence transparentes, mettant en avant les principes de la science ouverte et, dans la mesure du possible, indépendantes des éditeurs commerciaux.
Dans le paysage complexe des outils de référencement, de nombreuses plateformes contribuent à accroître la visibilité des revues. Hélène Lowinger souligne l’importance de cibler les bases de données les plus pertinentes pour une revue, plutôt que de viser une large diffusion à tout prix.
Parmi le vaste catalogue de bases de référencement, certaines sont généralistes, telles que Sudoc ou Mir@bel. Souvent interconnectées, elles sont prises en charge par des professionnels de l’information scientifique. D’autres, comme le DOAJ, Sherpa Romeo ou le ROAD, bien que généralistes, se concentrent particulièrement sur la politique d’accès ouvert des revues.
Certaines bases sont spécialisées par thématique, bénéficiant d’une reconnaissance dans des cercles scientifiques spécifiques et attirant un public plus restreint. Elles demeurent néanmoins pertinentes pour les revues partageant leur domaine de spécialisation.
Les moteurs de recherche académiques tels que Google Scholar, OpenAIRE ou OpenAlex jouent également un rôle crucial en collectant les métadonnées, soulignant l’importance de leur qualité, de leur lisibilité et de leur exhaustivité.
Pour optimiser l’efficacité du référencement tout en évitant des démarches fastidieuses, Hélène Lowinger recommande de sélectionner judicieusement parmi ces différentes options. Le choix des bases dans lesquelles référencer sa revue peut se faire en tenant compte de sa compatibilité avec la politique en matière d’accès ouvert d’une base, de sa thématique ou encore de son lectorat…
Une attention particulière doit être portée à la qualité et à la conformité des métadonnées et des contenus éditoriaux. Par exemple, une revue peut se voir refuser son indexation dans une base en raison de la non-conformité de son format aux exigences de la plateforme, notamment en ce qui concerne le nombre d’articles par numéro ou l’affichage des politiques de libre accès.
De fait, comment Inria référence les revues Episciences de son portefeuille ?
Tout d’abord, il est crucial de suivre les recommandations et les critères établis par des organismes de référence tels que le DOAJ, le COPE ou l’OASPA, essentiels pour garantir la qualité d’une revue. Les critères QUERO, par exemple, regroupent une série de préconisations à cet effet. Aussi, parmi ces critères doivent figurer la description du processus d’examen par les pairs, l’affichage des noms et des affiliations des membres du comité éditorial, ainsi que les mentions des licences et des droits d’auteur.
Hélène Lowinger insiste sur l’impérative nécessité d’afficher clairement et sans ambiguïté les réponses à ces critères. C’est pourquoi les responsables du référencement de ce portefeuille s’attachent à ajouter aux pages des revues, une page générique décrivant de manière exhaustive la politique éditoriale mise en œuvre.
De plus, dans une démarche de transparence, certaines bases de données peuvent exiger l’affichage des statistiques de la revue. Les statistiques peuvent inclure le taux de rejet, le délai entre la soumission et l’acceptation, ou encore la publication. Cette transparence est par ailleurs particulièrement appréciée des auteur·es, qui en font souvent la demande.
L’affichage de la bibliographie extraite des PDF peut également être requis par certaines bases de référencement, ce que permet Episciences via les API de Crossref ou d’OpenCitations, comme mentionné dans la première partie de ce billet.
En retour, les revues peuvent valoriser les bases dans lesquelles elles sont indexées, renforçant ainsi leur visibilité et leur crédibilité.
Focus sur Open Plasma Science
Présentation d’Aricia Bassinet et Aemil Querre
Dans le monde de l’édition scientifique, la plupart des revues en physique des plasmas adoptent le modèle hybride ou le modèle Gold open access, impliquant des frais (APC) pour la publication en libre accès.
Ce n’est pas le cas d’Open Plasma Science (OPS),portée par Jérôme Moritz, chercheur à l’Institut Jean Lamour. OPS est l’une des dernières revues diffusées par Episciences et soutenue par l’Université de Lorraine, qui, comme son nom l’indique, incarne pleinement le principe d’ouverture. Et pour preuve, il s’agit de la première revue en physique des plasmas à opter pour le modèle diamant .
OPS a décidé de se tourner vers Episciences pour la diffusion de ses publications. Ce choix s’aligne parfaitement avec le modèle diamant, prônant la gratuité pour les auteurs et les lecteurs et le modèle overlay* pratiqué par Episciences, particulièrement adapté à la communauté des physiciens, qui a historiquement soutenu les archives ouvertes.
À l’instar des autres revues publiées par Episciences, le contenu d’OPS s’appuie sur les preprints déposés dans des archives ouvertes, principalement HAL et arXiv, avant d’être soumis à l’examen du comité.
De plus, la présence du CNRS en tant que tutelle de la plateforme constitue un gage supplémentaire de solidité et de confiance pour les chercheurs et potentiels candidats à la soumission.
*”Un overlay journal est un type innovant de publication scientifique qui repose sur les entrepôts de données et les serveurs de preprints” – DARIAH-EU, 2024 (traduit de l’anglais).
Lancer une revue scientifique est un travail de longue haleine. Visant un lectorat international, la revue s’est naturellement dotée d’un comité éditorial cosmopolite, qui doit faire connaître la publication tout en fédérant des communautés d’auteurs et de lecteurs. Une gageure dans une discipline où l’Impact Factor d’une revue doit nécessairement être élevé pour envisager de publier.
OPS se fixe pour objectif de convaincre la communauté en publiant des articles de scientifiques de renom et des actes de colloques internationaux. Bien que l’objectif initial soit de figurer dans des index prestigieux tels que Scopus et le Web of Science, la priorité demeure de se faire référencer par le DOAJ et d’autres bases de données plus transparentes.
Encore jeune, OPS a un long chemin à parcourir avant d’être pleinement reconnue dans le domaine de la physique des plasmas. Cependant, avec le soutien indéfectible d’Episciences et de la Direction de la documentation de l’Université de Lorraine, OPS est bien équipé pour relever le défi. Cette collaboration assure une infrastructure robuste et un accompagnement stratégique, essentiels pour le développement et la visibilité de la revue.